D’où proviennent les résidus de tirs ?
Il s’agit de résidus d’amorce, résidus de poudre, de fumée, de particules de graisse ou de lubrifiant ainsi que de résidus métalliques provenant du projectile, de la douille et/ou de l’arme.
Ils sont produits dès le départ du coup de feu, lorsque le percuteur va percuter la capsule d’amorçage. Les résidus de tirs sont constitués de particules brûlées (entièrement, ou partiellement) et non brulées.
Comment se forment les résidus de tirs ?
Lorsque les particules solides de l’amorce et de la charge propulsive sortent de la bouche du canon, elles vont refroidir très rapidement du fait de l’expansion très rapide des gaz contenant ces résidus. Les composées de l’amorce, vont alors se condenser et former des particules caractéristiques plus ou moins sphériques d’un diamètre entre 0,1 et 40micromètres.
De quoi sont composés les résidus de tirs ?
Les résidus d’amorce sont constitués essentiellement de métaux lourds (Baryum, Antimoine, Plomb) alors que les résidus de poudre sont des résidus organiques, majoritairement des composés nitrés (nitrates, nitrites etc.).
Les résidus de fumées sont composés principalement de carbone, mais peuvent contenir des métaux vaporisés provenant de l’amorce, du projectile ou de la douille. Ces résidus de fumées peuvent donner une indication importante lorsqu’une arme se trouve proche d’une cible. En effet, la fumée dégagée par la bouche du canon peut se déposer sur la cible.
Comment se répartissent les résidus de tir ?
Lors du départ d’un coup de feu, les gaz de combustion se détendent principalement par la bouche du canon, ainsi que par tous les espaces non hermétiquement fermés de l’arme.
· Pour les revolvers, les résidus de tirs s’échappent par deux zones principales : au niveau de la bouche du canon et entre le barillet et le canon.
· Pour les pistolets, les gaz d’expansion sortent au niveau de la bouche du canon mais aussi par la fenêtre d’éjection de la douille au niveau de la main du tireur.
· Pour les armes longues, la répartition des résidus de tirs s’opère principalement au niveau de la bouche du canon. Ainsi, la main du tireur supportant le fût du canon sera plus susceptible de présenter des résidus de tirs. Dans le cas d’une arme a répétition manuelle, les résidus de tirs vont se concentrer sur la paume de la main qui va actionner le mécanisme d’ouverture et fermeture de la chambre à cartouche.
Il n’est pas rare de retrouver des résidus de tirs au niveau du visage, des cheveux et des vêtements du tireur. La persistance des résidus de tirs est d’ailleurs, plus importante dans les cheveux que sur les mains du tireur.
La forme, l’intensité et l’aspect de l’empreinte des résidus de tirs sur la cible dépend de nombreux facteurs dont :
- La distance de tir
- Le type et la quantité de charge propulsive
- L’angle d’incidence entre la bouche du canon et la cible
- La longueur du canon
- Le type d’arme
- La matière constituant la cible et son état (mobile ou non)
- Les conditions environnementales (pluie, vent, courant d’air,)
- Présence ou non d’accessoires situés sur la bouche de l’arme (silencieux)
- Le type de poudre (noire, sans fumée, simple base, double base …)
- La morphologie des grains de poudre (sphérique, paillette, cylindrique)
Une poudre de forme sphérique, possède une meilleure forme aérodynamique qu’une paillette cylindrique et par conséquent, est susceptible d’aller plus loin et à plus grande vitesse que les paillettes cylindriques.
La distribution des résidus de tirs sur une cible est influencée par de nombreux paramètres :
- La distance de tir (plus le tir est effectuée à longue distance plus les chances de trouver des résidus de tirs sur une cible sont minces. Inversement, plus le canon de l’arme se rapproche de sa cible, plus la concentration de résidus augmente autour de l’impact)
- Les caractéristiques chimiques de la poudre (présence d’inhibiteur ou non) et du coefficient de combustion de celle-ci (vivacité de la poudre qui peut être soit lente, neutre ou vive).
- Le type, la marque et le modèle de l’arme (exemple entre un calibre .22LR et un calibre .357 Magnum)
- La longueur du canon (canon scié, canon court, canon long , présence d’un silencieux)
- L’angle de tir
- Les conditions atmosphériques (vent, pluie)
- La composition de la cible (peau, tissu, béton etc)
Considérant l’ensemble de ces paramètres, la Police Technique et Scientifique doit être en mesure d’estimer une distance de tir et de déterminer si une personne a tiré ou non avec une arme. Pour cela des méthodes optiques, chimiques et instrumentales sont utilisés afin de mettre en évidence ces résidus.
Détection des résidus de tirs
Les méthodes optiques
La méthode la plus simple (et la plus économique) consiste à visualiser sur une cible les résidus de tirs à l’œil nu ou à l’aide d’un macroscope, sous différents éclairages et agrandissements.
Résidus de tir sur un tissu sombre en lumière blanche
Il arrive que la couleur du support puisse gêner la visualisation des résidus de tirs (cible de couleur sombre ou contamination par du sang). Dans ce cas, une observation sous lumière infra-rouge est recommandée. Les molécules organiques et les tissus colorés ou foncés réfléchissent les infrarouges alors que les résidus de tirs absorbent les rayonnements infrarouges. Sous lumière infrarouge, les résidus de tirs seront alors plus foncés que le support.
Résidus de tir sur ce même tissu sombre en lumière infra-rouge
Les méthodes chromophoriques
Les procédés chromophoriques doivent leur appellation au fait qu’ils se basent sur des réactions chimiques engendrant la coloration des particules de résidus de tirs. La plupart de ces tests chromophoriques ne sont pas spécifiques aux résidus de tirs. En effet, certaines professions comme la métallurgie, la carrosserie, la peinture peuvent provoquer des résultats positifs à ces tests (faux positifs). Les tests chromophoriques sont donc des tests d’orientation. En voici quelques exemples :
a) Test de Griess modifié
Cette méthode permet la révélation des nitrites (particules de poudre brûlées) présents sur la cible. La réaction chimique est la suivante :
Réaction chimique entre des ions nitrites avec le test de Griess
Cette méthode se présente sous la forme d’un transfert de particules à analyser sur un papier photographique développé et fixé sans avoir été exposé à la lumière (papier Stockis). Ce papier est préalablement traité avec une solution d’alpha-napthol dans de l’acide sulfanilique. Ainsi lors de l’apposition sur papier Stockis, les particules de résidus de tirs brûlées (nitrites) se colorent en orange. Les papiers Stockis ont une limite de détection fixée à 0,1mg et peuvent être conservés plusieurs années.
b) Test au rhodizonate de sodium
Cette technique permet la révélation des particules de Baryum (Ba) et de Plomb (Pb). Le rhodizonate de sodium peut être appliqué suivant deux méthodes :
Réaction chimique entre les éléments chimiques Plomb et Baryum et le Rhodizonate de sodium
- Une méthode directe où le produit est vaporisé directement sur la cible pour la révélation des métaux lourds.
- Une méthode indirecte où l’on transfère les particules sur un papier filtre (transfert de Bashinski) et l’on vaporise le réactif ultérieurement.
Ce test au rhodizonate de sodium permet une coloration rose-pourpre des particules de baryum et de plomb.
Les limites de détection pour cette méthode sont de 0,1microgramme pour le plomb et de 0,25 microgramme pour le Baryum.
Le rhodizonate de sodium n’est pas spécifique à ces deux molécules. En effet, une coloration peut se produire avec les particules métalliques suivantes (argent (Ag+) en noir, mercure (Hg+) en rouge brun, thallium (Tl)+ en brun foncé, et cadmium (Cd2+) en rouge brun).
Les méthodes instrumentales
Il existe un grand nombre de techniques instrumentales permettant la révélation et/ou visualisation des résidus de tirs. Le choix de la technique dépend de la nature organique ou inorganique des résidus, de la rapidité de réponse (temps de la garde à vue ou non) et de l’importance de l’affaire (dégradation, homicides, suicide).
- Activation neutronique
- Absorption atomique
- Microscopie électronique à balayage (MEB)
- Chromatographie en phase liquide à haute performance (HPLC)
- Chromatographie en phase gazeuse couplée à une spectrométrie de masse (GC-MS)
- Electrophorèse capillaire (CE)
- Chromatographie sur couche mince (TLC ou CCM)
Le microscope électronique à balayage (MEB) ou Scanning Electron Microscope (SEM) permet d’effectuer d’excellents examens de la topographie d’une surface en grande partie grâce à une très grande profondeur de champs.
Exemple d’une photographie réalisée au microscope électronique à balayage de pollen
Principe de fonctionnement du microscope électronique à balayage
Cette technique utilise un fin faisceau d’électrons, émis par un canon à électrons grâce à un filament de tungstène chauffé par un courant. Ce faisceau d’électrons est accéléré par un courant à haute tension (jusqu’à 30.000V) qui est créé entre le filament et l’anode. Une série de trois lentilles électromagnétiques permettent de focaliser le faisceau d’électrons sur l’échantillon.
Lorsque le faisceau d’électrons rentre en contact avec l’échantillon, cela provoque la formation :
· d’électrons secondaires d’énergie plus faibles
· d’électrons rétro-diffusés
· de rayons X
Les électrons secondaires sont amplifié, détectés et convertis en signal électrique. Ce processus se répète pour chaque point (1 nanomètre) de l’échantillon par un balayage au microscope. L’ensemble des signaux permet de reconstruire la typographie de l’échantillon et de fournir une image en relief.
Kit de prélèvement de résidus de tirs
L’analyse au microscope électronique à balayage couplé avec une micro-analyse X à dispersion d’énergie permet de détecter des particules de résidus de tir sur la base de leur forme et de leur composition élémentaire. Elle est d’ailleurs, la seule technique permettant de déterminer la morphologie et la composition d’une particule. Ce sont ces deux critères (morphologie et composition élémentaire) qui permettent des différencier les résidus de tir des autres particules ayant la même composition mais d’origine différente (ex. résidus d’essence contenant du plomb, les métiers de la métallurgies, particules de terre riche en baryum)
Déposition des résidus de tirs principalement sur le dors de la main du tireur (au niveau du pouce et de l’index)
Analyse d’une particule de résidus de tir au microscope électronique à balayage couplé à une micro-analyse-X